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A un passant (qui ne passait pas)
Long, mince et immobile dans ta cage de verre,
Transparence où flottait l’insondable mystère
De l’être invisible avec qui tu conversais ;
Tranquille incarnation de la désinvolture
Inconscient de mes yeux avides qui guettaient
Un signe, quelque chose, je ne sais quoi en fait
Tandis qu’entre nous deux rugissaient les voitures.
Un camion… puis plus rien. Stupide véhicule !
J’ai perdu mon bonheur et c’est ta faute, ô traître !
J’erre sur le boulevard, hébétée, ridicule…
Là-bas, sur le trottoir ? dans cette rue, peut-être ?
J’ignore où tu as fui, je ne sais où aller,
O toi que j’eusse aimé, ô toi qui t’en foutais !
- Boulevard Saint-Michel – 17. XII. 98 –
Charlie ne m’en voudra pas, je l’espère, d’avoir parodié sa sublime Passante…
Commentaires :
-nungesser- |
En passantJe pense ne pas m'être trompé en déposant ceci ici. ;)
« - Quelqu’un a-t-il, en cette fin du XIXème siècle, la notion claire de ce que les poètes, aux grandes époques de l’humanité, appelaient l’inspiration ?… Pour peu que l’on ait gardé en soi la moindre parcelle de superstition, on ne saurait en vérité se défendre de l’idée qu’on n’est que l’incarnation, le porte-voix, le médium de puissances supérieures. La notion de révélation, entendue dans ce sens que tout à coup « quelque chose » se révèle à notre vue ou à notre ouïe, avec une indicible précision, une ineffable délicatesse, « quelque chose » qui nous ébranle, nous bouleverse jusqu’au plus intime de notre être, est la simple expresssion de la réalité. On entend, on ne cherche pas ; on prend, on ne se demande pas qui donne ; tel un éclair, la pensée jaillit soudain avec une nécessité absolue, sans hésitation dans la forme. Je n’ai jamais eu à faire un choix. C’est un ravissement dont la prodigieuse tension se soulage parfois par un torrent de larmes, où nos pas, sans que nous le voulions, tantôt se précipitent, tantôt se ralentissent ; c’est une extase imparfaite qui nous ravit à nous-mêmes, en nous laissant la perception très distincte de mille frissons délicats qui nous font vibrer tout entiers, jusqu’au bout des orteils ; c’est un abîme de bonheur où l’extrême souffrance et l’extrême horreur ne sont plus éprouvés comme une opposition, mais comme parties intégrantes et indispensables, comme une nuance nécessaire au sein de cet océan de lumière. C’est un instinct du rythme qui embrasse tout un monde de formes (la grandeur, le besoin d’un rythme ample est presque la mesure de la violence de l’inspiration, et comme une sorte de compensation à un excès d’oppresssion et de tension)… Tout cela se passe sans que notre liberté y ait aucune part, tandis que nous sommes entraînés, comme en un tourbillon, par un sentiment plein d’ivresse, de liberté, de souveraineté, de toute-puissance, de divinité… Telle est mon expérience de l’inspiration… » Friedrich N. |
à 15:35