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La mort est le grand événement de la vie.
Pour beaucoup, c'est le seul événement vraiment grave, le seul pour qui les gens se déplacent. Qui n'a jamais trouvé une excuse pour ne pas aller à ce mariage ou pour ne pas cotiser pour l'inévitable cadeau commun de tout individu qui a soi-disant "beaucoup d'amis"? Pour la mort, on n'ose pas se défiler. C'est qu'elle est la dernière à forcer un peu le respect.
Si j'aime les cimetières, ce n'est pas par goût de la déréliction morbide, c'est que j'aime l'idée que d'aussi vastes parts de l'espace urbains ne soient dédiées qu'aux morts et à ceux qui s'en souviennent. Ne seraient-elles pas beaucoup plus rentables pourtant si elles étaient destinées à l'immobilier ou à l'implantation de grandes surfaces? Pourquoi pas en centres de réinsertion, puisque la mode est à la citoyenneté? Non, ce sont de petites villes qui abritent les restes et le souvenir de ceux qui étaient là avant nous. Bons ou mauvais, illustres ou médiocres, salauds notoires ou héros anonymes, ont tous droit à leur nom dans la pierre, avec leurs dates, comme les morts célèbres.
Combien de fois me suis-je demandé, devant une pierre tombale ou un caveau Qu'a-t-il fait durant sa vie? Qui a-t-il aimé? Tiens, sa femme est morte deux ans après lui... De chagrin peut-être... On a en effet toujours de la peine à imaginer que ce pût être pour avoir trop nocé depuis que ce vieil emmerdeur a cassé sa pipe! Quoi qu'il en soit, ils reposent en voisins et ont l'éternité pour s'aimer ou régler leurs comptes.
Les cimetières sont des villes silencieuses et comme pour celles des vivants, je préfère celles qui offrent une sinuosité dans leurs rues et leurs allées, comme dans les vieux quartiers aux vieilles pierres marquées par la pluie et le temps. Les cimetières modernes avec leurs tombes en faux-marbre poli, clinquantes et alignées comme les pavillons d'un lotissement de banlieue me dépriment profondément: l'éternité dans un dortoir... J'y préfère le cossu Père-Lachaise, ou celui de Montmartre où des angelots pensifs, des jeunes filles en pleurs et en fleurs attendent patiemment la résurrection des corps. En effet, ce qui frappe dans ces nécropoles anciennes, c'est ces milliers de voix de pierre qui ne disent qu'une seule chose: "Je t'attends" Plus fidèles que les oublieux vivants, ces touchantes figures parfois rongées de mousse témoignent encore aux défunts un interminable et dernier geste de tendresse. Cette femme voilée assise, qui tient un bouquet dont les pétales minéraux n'en finissent plus de fâner, celle-ci qui, le bras levé, s'accroche à la fenêtre du caveau, le visage caché, dans l'abandon presque langoureux des larmes, cet ange majestueux qui semble pleurer avec les hommes la perte de ceux-là dont la fin est pourtant fatale... Les vivants peuvent oublier leurs défunts, eux montent la garde.
Commentaires :
Ezekiel |
très bon texte... je n'étais jamais venu sur ces pages, dommage... très bon texte en tout cas, je le répète parce que c'est vrai...
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WeepingWillow 01-10-04
à 15:21 |
Re:C'est gentil de me dire ça, car en le relisant, je l'avais trouvé ridicule! Ca m'encourage, merci! |
à 14:47