J'aimerais pouvoir écrire plus et en même temps le geste même m'installer devant mon clavier et chercher des belles phrases m'énerve. L'activité consistant à faire le catalogue de ses émotions me gonfle de plus en plus et je me perds de toutes façons dans le bavardage. Avant même d'avoir commencé, je sens n'avoir rien à dire et quand bien même... Avoir quelque chose à dire, quelle connerie. Dire quoi? dire à qui? Pondre un truc et dire "'Gade! 'gade! T'as vu comme c'est beau? dis c'est beau ce que j'écris, dis, tu aimes bien? Dis, dis..." On fait tous la même chose de toutes façons, nos nombrils en ribambelle et c'est juste ennuyeux à mourir.

En ce moment, je préfère voir, observer, contempler et tant pis si ça ne fait pas un post. Samedi matin, j'attendais un bus place du Châtelet et je voyais passer des cars de touristes avec des objectifs de camescope en guise d'yeux rivés aux fenêtres. Fixer tout ce qu'on voit, même ce qu'on ne regarde pas pour pouvoir se refaire le voyage après, sur l'écran plat quarante douze pouces flambant neuf du salon, t'as vu? on s'y croirait... Ces mêmes gens pourraient se gâcher tout un voyage s'ils avaient le malheur d'oublier leur appareil... Aujourd'hui j'essaie de vivre les mains dans le poches sans me dire c'est trop zut, j'ai pas eu le temps d'écrire ça et maintenant c'est parti... La mémoire estompe, la mémoire déforme mais elle nourrit l'imaginaire, ce grand malade de nos cerveaux trop rectilignes. Le souvenir qui fuit se distord en méandres et alimente en sous-main les rêveries à venir. Et ce sera toujours mieux qu'un album ou un film de vacances.