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Ce matin nous sommes allés - bons parents - à la réunion "d'accueil et d'information" pour la rentrée de maternelle. Nous y allions relativement motivés, le petit était tout à l'excitation de découvrir un nouvel endroit avec plein de pièces inconnues, de portes à ouvrir, de placards à vider. En attendant dans la cour avec d'autres familles, je l'observais au milieu des autres. Là où tous restaient relativement groupés, les uns impressionnés et intimidés, d'autres déjà en train de contracter des alliances, le nôtre allait de l'un avec une sorte d'indifférence, grillait tranquillement la priorité au toboggan de la petite commère de service - je la connais, celle-là, j'avais la même dans ma classe, chaque année: celle dont on vante la précocité verbale, celle qui se mêle de tout et finit toujours par offrir aux maîtresses ses services d'auxiliaire - restant sourd à ses "Hé! Tu n'as pas le droit! Ce n'est pas ton tour!", déjà occupé par un autre objectif: la porte donnant sur les salles de classe...
Enfin, nous pénétrons dans la salle où la directrice doit nous faire son speech, on nous fait asseoir sur des bancs taille trois ans - sans doute une viciosité pédagogique censée nous mettre en situation - S. me fait comprendre en un coup d'oeil qu'il restera debout dans le fond. Déjà, le petit, ainsi que d'autres, ne s'avèrent pas aussi disciplinés que leurs géniteurs et manifestent de plus en plus bruyamment leur envie de retourner jouer dans la cour. Les parents des réfractaires tâchent alors discrètement de se faire obéir, intérieurement tendus par l'inquiétude de passer pour des parents laxistes, et n'osant pas non plus mettre une taloche au braillard devant tout le monde. Inconsciemment, j'ai dû penser que la directrice, par expérience, avait prévu la situation pour que cela ne vire pas au drame, un truc dans le genre simple et concis, parce qu'elle est censée connaître les enfants. Elle nous invite alors d'une petite voix, dans un sourire bienveillant de cinquantenaire, à faire un peu de silence "parce que j'ai déjà eu une réunion pour un premier groupe ce matin et qu'il me faut encore de la voix pour finir l'année"... Sans blague, c'est nous qui pleuront, peut-être... Elle se lance alors dans son "discours", d'une insupportable voix mal posée, sur laquelle elle force avec une évidence qui me fait mal à la gorge, discours digressif, comme si elle n'avait pas préparé ce qu'elle devait nous dire, ponctuant ses errances de "Euh" et de sourires mielleux, passant des horaires de l'école au fonctionnement de la cantine, pour évoquer ensuite qu'un enfant doit être le plus autonome possible parce que "vous vous rendez compte de ce que ça peut être, trente enfants (on la sent en plus légèrement paniquée)... Hein? [sourire mielleux] Heu... Oui, donc pour les pipis... Euh... [sourire mielleux]..." Et elle traîne, et j'ai de plus en plus de mal à tenir le petit monstre, et elle traîne encore "Vous savez ce que c'est... [sourire mielleux]..." S'accrochant comme à des bouées à quelques termes consacrés qu'elle répète inlassablement: "protocole d'accueil", "autonomie", "référent"...
Je me retourne vers S. qui me fait son sourire de chat, je lis dans ses yeux qu'il pense la même chose et ça me réconforte un peu. Et cette mère qui laisse sa gosse vagir d'une voix d'hélicon, le petit qui commence à vouloir grimper partout. La vieille aborde la question de l'assurance scolaire quand finalement, je le conduis dehors... Tout ça me laisse une impression, pas vraiment d'incompétence, mais d'approximation complète, qui m'inquiète de plus en plus. Cette femme, directrice semble-t-il depuis un certain nombre d'années, ne gérait visiblement pas du tout la nervosité croissante des enfants, qui gagnait aussi les parents; n'avait pas songé une seconde à prévoir quelque chose comme un papier récapitulant ce dans quoi elle s'enlisait depuis 20 minutes, s'adressait à nous avec un ton lent et simpliste qui aurait dû faire sortir de leurs gonds une bande de demeurés eux-mêmes... Et c'est à ça que je vais confier mon petit Rain-Man...
Puis la réunion se clôt sur un "Maintenant, je vous invite à... Euh... faire le tour des différents espaces[mince, j'aurais espéré un apéro]... pour que vous puissiez prendre vos repères... Hein? [sourire mielleux]... Comme vos enfants, vous avez aussi besoin de repères..." ouais, ben visiblement, tu n'es pas la meilleure personne pour en donner, des repères...
Le petit, quant à lui, n'a pas l'air impressionné du tout par l'endroit, prend ses aises, ouvre les tiroirs, essaie toutes les chaises, emprunte les escaliers, file dans les couloirs... On le perd une fois, même. Ce à quoi la même directrice ne put que dire: "Ah, vous avez perdu votre petit?" Puis "Ah, vous l'avez retrouvé?" Ca promet...
Les repères pris, nous n'avons plus qu'à rentrer chez nous en attendant septembre.
J'ai beau me répéter qu'au fond, je n'ai pas de raison de m'en faire... Je ne suis pas tranquille.
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