Il y a quelques temps, un de mes rêves fut assez longuement perturbé par un nom récurrent comme un appel: l'étang de Walden. Le plus curieux est que je rêvais aussi de sa traduction en anglais (Walden Pond) alors qu'on m'aurait posé une colle si, éveillée, on m'avait demandé comment on dit "étang" en anglais...

Parce que j'ai passé toute ma soirée assise sur cette chaise devant l'ordinateur à feuilleter d'un oeil absent des dizaines de blogs de lycéennes mélancoliques à l'approche du Bac et de la fin de leur scolarité, j'ai été emmerdée toute la nuit par une sensation de broiement au niveau des reins et des rêves d'élèves me demandant de l'aide pour leurs révisions alors que -bordel! je suis prof de première et pas de terminale fichez-moi la paix.

Je devais reparler de mes rêves.

Cette nuit, j'ai rêvé que je mourais par injection.

J'ai pu sentir un froid brûlant naître au creux de mon bras droit et m'envahir progressivement tout le corps tandis que ma vision se brouillait petit à petit dans le noir.

A la dernière minute je songeais à prier.

Ma psy, une femme d'âge avancé au physique de série américaine n'écoute mon récit que d'une oreille distraite et semble plus préoccupée d'une autre affaire embrouillée de clients qu'elle devait m'envoyer pour expérimenter une de ses théories - elle m'apprend à cette occasion que je suis kiné et gauchère mais que ce n'est pas grave, car finalement elle a choisi de faire traiter un patient gaucher par un kiné droitier et que l'expérience était tout aussi intéressante. Je perds donc trois clients qu'elle m'avait pourtant promis, mais je ravale ma rancoeur et essaie de la convaincre de ce que j'ai vu dans mon rêve.

Puis soudain, à un signal que je ne sais plus trop avoir entendu ou deviné, tous les passants semblent agir automatiquement, certains s'engouffrent dans les bâtiments bordant les rues, tous identiques, je m'en aperçois alors, comme de grands hangars, d'autres se mettent au garde-à-vous le long du trottoir pendant qu'une espèce de patrouille descend la rue et contrôle quelques passants au hasard. J'ai tôt fait de remarquer que cette cité d'apparence si sympathique s'avère être un brin totalitaire et quelque chose me dit que les nouveaux venus n'ont pas intérêt à se faire remarquer.

Tout a commencé parce que S. se faisait du souci pour son ex, une suédoise, qu'il n'avait pas vue depuis des années mais dont il avait appris récemment qu'elle avait de gros problèmes. Comme il semblait inquiet, je finis par consentir à ce qu'il aille sur place l'aider, à condition que je l'y accompagne. Nous voilà donc partis pour ce qui semblait être la Suède, accompagnés semble-t-il de ma soeur. Je me rappelle avoir tenté de le rassurer, que ces "problèmes" n'étaient sans doute pas pires que d'autres et que la distance lui avait fait exagérer les choses. J'avoue que j'étais plus soucieuse de voir à quoi ressemblait cette fille que de résoudre ses problèmes. Nous trouvâmes donc la fille, une sympathique blonde comme on se figure toutes les Suédoises qui nous explique si je me souviens bien, que sa mère a disparu depuis des mois et que, je ne sais plus par quels chemins, elle est arrivée à la conclusion qu'elle est partie vivre en ermite quelque part dans le Nord.

Nuit difficile, sommeil de feuille. Retour de vieilles angoisses devenues presque classiques à l'approche de Noël et des crises de larmes qu'elles engendrent toujours. Marque des dents sur mon poing tâchant d'oublier par une douleur plus franche et physique celle, lancinante et bourdonnante, de mon esprit. Savoir qu'au fond du coeur de chacun des membres de la famille je suis LA responsable du demi-deuil que mon absence semble devoir imposer à chaque réunion ou fête "de famille".

Lettre de Denys - trois feuillets imprimés sur du vélin beige plié en six - avec une image aux couleurs d'enluminure sur l'un des six tiers du recto verso, au milieu, à droite, comme une petite couverture illustrée quand on replie le feuillet - il m'y vante notamment les mérites d'une édition de l'Utopie dont la seconde partie a été en réalité écrite par Platon (?!?) m'assure-t-il, enchaînant ensuite sur le caractère proprement nietzschéen du Roi Lion de Disney... - Mon esprit se débat avec un violent effort pour émettre timidement l'idée que Platon était peut-être légèrement antérieur à More, mais je n'en suis finalement pas sûre...

Cette nuit, j'ai rêvé de G.